Approche comparative à partir du cas des arabophones de Mauritanie
Mariella Villasante de Beauvais
Dans le monde contemporain, dominé par les valeurs de liberté et d’égalité sociale, parler de ” groupes serviles “, de ” relations serviles “, d'” esclavage ” paraît anachronique, si ce n’est scandaleux. C’est probablement pour cette raison que le thème reste peu étudié et surtout sujet à de forts tabous dans la plupart des pays concernés, au Sahara, en Afrique et ailleurs. Le cas mauritanien est ainsi régulièrement dénoncé comme le paradigme de la permanence de relations hiérarchiques et serviles. Au-delà de ces accusations qui s’appuient souvent sur des images simplistes et faussées alimentant les préjugés occidentaux sur la ” sauvagerie des Africains ” ou la ” fatalité du destin des esclaves “, comment saisir la réalité plus complexe des sociétés hiérarchiques ? L’objectif de cet ouvrage collectif est de dresser un premier état des lieux de la situation historique et contemporaine des groupes serviles au Sahara à partir du cas de la société arabophone (bidâm) de Mauritanie. L’ensemble des contributions remet en cause un certain nombre d’idées et d’analyses conventionnelles sur la question, en particulier celles qui considèrent que les hiérarchies et les statuts ” serviles ” seraient fixes et rigides, associés à un phénotype, et se reproduisant depuis des siècles ad vitam aeternam. C’est une réalité bien distincte qui est ici mise au jour, faite de fluidité, de changement, de mobilité forte et d’un grand métissage culturel et social entre les groupes ” libres ” et ” serviles “.